• Mystères de Garonne

    La majestueuse sillonne turbulente au cœur de la ville séparant deux entités distinctes presque rivales : la rive droite populaire, la rive gauche politique et bohème. Sa couleur ocre virant au marron à la marrée montante l’accuse à tort de « sale » alors qu’elle n’est le fruit que d’une alchimie d’une rencontre amoureuse entre les eaux salées de l’océan et celles plus douces de son courant agitant ainsi des millions de particules d’argile en suspension plongeant l’ensemble de son lit dans une obscurité la plus totale. Dangereuse elle demeure en raison de ses courants, de ses tourbillons, de ses nombreux débris qu’elle charrie tout au long de l’année. Elle n’est pas le lieu de la baignade rafraichissante d’une journée d’été tropicale. Pourtant cette grande dame, née en Espagne, fière de ses 522 km, accueille à bras ouvert une fois l’an des plongeurs, impatients de goûter à la douceur de son lit, qui se mesurent à sa force hydraulique tout au long d’un parcours de 1700 mètres. Et ceux qui prétendent que la pollution est le pire de ses maux, ceux-ci n’y ont guère pêché de poissons. Elle abrite pourtant quelques esturgeons dansant la gigue avec ces lamproies et autres aloses et elle brille également par la qualité de son eau. Tous les deux ans, elle est la reine d’une grande fête où certains grands navires viennent le temps d’une semaine y déposer leur ancre d’amarrage pendant que leurs coques se laissent caresser par les ondulations de la belle agitée. Elle s’efface élégamment d’une année sur l’autre pour laisser la place à son compagnon d’infortune riche de saveur de fruits rouges aux accents plus moins tanniques et astringents selon le millésime.

    Mystères de Garonne

    Elle fascine par ses caprices et ses mystères. Elle reste majestueuse et indomptable. Elle attire les regards lors des grandes marées où le mascaret remonte à contre sens son courant permettant à certains de tenter quelques figures stylistiques de surf…elle devient aujourd’hui l’inspiratrice de légendes urbaines sordides. La rumeur gronde, enfle au fil des mois et des découvertes macabres. Les accidents se multiplient et certaines langues bien pendues aimeraient y voir l’œuvre d’un détraqué surnommé le « pousseur », reprenant le même surnom que l’hypothétique désaxé qui poussait ses victimes dans la Deule. D’autres fantasment sur le traffic d’organe car les victimes ont toutes le même profil et que les coïncidences sont troublantes…hormis la sixième (comme par hasard…)…la garonne devenant pour toutes leur ultime tombeau. Alors cette illustre dame se voit accuser des pires maux. Son accès n’est pas sécurisé par des barrières. Aucune bouée de sauvetage sur les quais. Pourquoi ne pas détourner le fleuve tant qu’on y est ou alors la recouvrir d’une voute en béton de part et d’autre des berges pour ainsi ne plus la voir, elle et sa couleur marron. Elle devrait être surveillée jour et nuit pour éviter ces noyades. Seulement voilà…la dernière victime a été vue vivante dans ce courant meurtrier, en plein jour, avec des secours rapides mais dont les efforts ont été vains. La rumeur préfère brandir le spectre du malin et du désaxé plutôt que de se rendre à l’évidence du pur et simple accident de la voie publique secondaire à l’inconscience exacerbée de ces malheureuses victimes. Il est souvent tellement plus simple de chercher un coupable que d’accepter cette cruelle vérité. Et comme la rumeur ne meurt jamais,…elle s’est dirigée maintenant à quelques kilomètres de là.

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  • Commentaires

    1
    Mercredi 27 Juin 2012 à 22:11
    Flavien2

    Très alléchant, ton début de roman. Les descriptifs de la capitale de l'Aquitaine et son fleuve valent le détour. A quand la suite, la suite, et la suite?

    2
    Le Poussin Profil de Le Poussin
    Jeudi 28 Juin 2012 à 12:15

    @ Flavien : Bizarre que tu imagines que ce soit le début d'un roman :) Je crois ne pas avoir assez d'imagination pour me lancer dans ce défi...en tout cas merci pour tes encouragements

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